Des manifestations pour la paix et la sécurité dans la partie orientale de la RDC et le départ de la MONUSCO se sont multipliées en ces jours. Dans les provinces de la partie Est du pays, comme à Kinshasa ou au Kong central ( à Banza-Ngungu), des manifestations pour la paix contre les tueurs, les égorgeurs de Béni, Ituri dans le Nord-Kivu et dans le Sud-Kivu, d’une part et pour exiger le départ de la MONUSCO d’autre part. Les élèves de Béni se sont démarqués en faisant 10 jours de sit-in ( jours et nuits) devant la Mairie de Béni pour réclamer la paix et l’arrivée du Chef de l’Etat à Beni, dénoncer le mutisme de la Communauté internationale face aux massacres des civils à Béni et exiger le départ immédiat de la MONUSCO.
Le Président de la République, Félix Tshisekedi, en réponse aux manifestants, a rassuré que les mesures sont prises pour éradiquer les égorgeurs, les groupes armés et ramener la paix dans l’Est du pays. Entre autre mesures prises, il y a une forte déploiement des soldats au front dans cette partie et une création ou déploiement d’une Brigade congolaise spéciale d’intervention pour ramener la paix. A en croire les propos du Président Félix Tshisekedi, le départ de la MONUSCO n’est pas à l’ordre du jour.
Par rapport à la MONUSCO, la paix au pays et l’efficacité de la Brigade congolaise d’intervention, nous avons interrogé le livre de Karhakubwa, intitulé « La Construction de la paix et le rôle de la MONUSCO », un livre qui analyse la problématique de l’agressivité de la population congolaise contre la MONUSCO; en tout cas l’unique du genre jusqu’à ce jour.
Pour le chercheur Bienvenu Karhakubwa, » aujourd’hui, il n’ y pas d’alternative à la présence de cette mission de l’ONU, les institutions nationales de sécurité étant très fragiles. Le départ brusque et non préparé de la MONUSCO serait fatidique pour la RDC. Cela s’avère autant plausible que si la MONUSCO quitte le pays d’une manière impreparee, elle laisserait un vide derrière elle, susceptible de produire soit l’éclatement du pays où une crise de paix plus forte qu’avant et un recul démocratique », lit-on à la page 277 de son livre.
« Le retrait de la MONUSCO devra être précédé d’ une évaluation technique et stratégique de ses résultats et l’examen des alternatives pour le pays. Un retrait préparé et progressif pr éviter le pire éventuel après son départ. »
Il est vrai que les résultats de la MONUSCO ne sont pas suffisants au regard des attentes de la population locale en matière de paix et sécurité, et à la taille de son mandat. Mais son absence brusque en RDC serait pire que sa presence ne l’est, aujourd’hui .
Le livre interpelle l’ONU et les dirigeants congolais à plus de responsabilité. « L’ONU devra s’interdire de laisser en RDC, consciemment ou non, un décor de chaos qui rendrait la gouvernance sécuritaire et même la gouvernance politique intenables après le départ de sa Mission…. Si en 1960, l’ONUC (La Mission de l’ONU au Congo) sauva la RDC de la balkanisation, son départ en 1964 a laissé un décor d’une crise couvée, ingrédient nécessaire au coup d’Etat militaire de Mobutu quelque temps après., suivi d’une longue dictature » » Les dirigeants congolais n’ont pas su gérer l’après ONUC et le pays en a subi les effets. Ils devront être pro actifs cette fois-ci et cesser de penser que les choses vont bien aller de soi, sinon le pays en subira d’autres, peut-être plus durs, après le départ de la MONUSCO », note le livre à la page 277
Somme toute, les manifestations de la population contre la MONUSCO restent légitimes et doivent interpeller cette mission de l’ONU pour améliorer ses prestations au benefice des attentes locales en paix et sécurité pour soigner son image; plutôt que rester sur la défensive. Une attention particulière devra être accordée aux activités de transfert des compétences aux structures nationales. Les dirigeants congolais doivent se sentir aussi interpellés, et en premier d’ailleurs.
Il convient de faire remarquer que dans sa résolution de décembre 2020 à l’instar de celle de mars 2015, le Conseil de sécurité de l’ONU donne mandat à la MONUSCO d’éradiquer les groupes armés en RDC, AVEC OU SANS LES FARDC. La MONUSCO à donc l’obligation des résultats
Par ailleurs, en quête de solution, le déploiement ou la création d’une Brigade spéciale congolaise pour lutter contre les tueurs et egorgeurs ds l’Est du pays reste une bonne chose. Cependant la prise en charge socio-economique de ces soldats reste un défi majeur pour espérer de bons résultats. Sinon, ces soldats congolais ne tarderont pas d’être frustrés par le traitement leur réservé par rapport à celui de soldats onusiens de la Brigade d’intervention de la MONUSCO, avec lesquels ils sont appelés à opérer ensemble dans la même zone où ils sont placés d’ailleurs en première ligne. Cette Brigade congolaise d’intervention opérant pour ramener la paix constitue une de bonnes mesures stratégiques de préparation du retrait de la MONUSCO.
Dans cette optique, le chercheur Karhakubwa appelle l’ONU le Conseil de sécurité de l’ONU à examiner comment ces soldats congolais de la Brigade congolaise d’intervention peuvent être traités comme des « Contingents-pays » pour un traitement équitable, à l’image des Contingents Zaïrois pour la Sécurité des Camps (CZSC). Le contexte congolais appelle l’ONU à innover pour espérer de bons résultats. A ces efforts militaires, il faudra joindre des actions politiques et dipomatques, pourquoi pas aussi économiques; tous les fronts doivent être activés.
» L’ONU ne paie pas les militaires du pays hôte, en principe. Cependant, un plaidoyer spécial devra être mené pour que ces quelques unités spéciales des FARDC, qui se battent ensemble avec les casques bleus de la MONUSCO, soient considérées comme des « Contingents pays » pour un traitement conséquent pendant toute la durée des opérations militaires mixtes. En effet, l’ONU n’a pas d’armées. Les casques bleus sont des contingents fournis par des États membres. Étant donné le contexte particulier de la RDC, l’ONU peut considérer ces unités congolaises ( de la Brigade congolaise d’intervention notamment) qui interviennent en opération mixte avec les casques bleus de la MONUSCO comme des » Contingents pays » pendant toute la durée des opérations mixtes ( contre les groupes armés dans les zones rouges dans l’Est du pays), et exceptionnellement les rémunérer en cette qualité. Un tel traitement peut améliorer sensiblement les résultats des opérations contre les groupes armés en faveur de la stabilité et de la paix en RDC. Il s’agit en effet d’un ploidoyer à mener auprès des instances supérieures de l’ONU. », note le livre du chercheur Karhakubwa à la page 411.
» Cela ne serait pas quelque chose de tout nouveau au pays de Lumumba. D’aucuns se rappellent qu’en 1995-1996, il y a eu des Contingents Zaïrois pour la Sécurité des Camps, CZSC en sigle, au service du Haut Commissariat des Nations Unies aux Réfugiés ( UNHCR), pour assurer la protection des camps des réfugiés Rwandais Hutu au Sud-Kivu et au Nord-Kivu. Ces contingents constitués des soldats congolais des FARDC , à l’époque FAZ, étaient pris en charge par l’ONU, à travers son agence UNHCR. », poursuit à la page 413 le livre » La Construction de la paix et le rôle de la MONUSCO » de Bienvenu Karhakubwa, Chercheur en Paix et developpement, et de la MONUSCO », et fervent acteur de la Société civile engagé pour la paix dans la Region.
La rédaction
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