Par BBC News Afrique
Désormais opposant vivant en exil au Kenya, l’ancien président de la commission électorale congolaise a lancé un « appel à l’unité nationale pour la stabilité de la République Démocratique du Congo ». Voici ce qu’il faut savoir sur cette plateforme.
C’est au cours d’une déclaration devant la presse dans la capitale kenyane que Corneille Nangaa, qui s’est engagé en politique en février dernier, a fait l’annonce de la création de « l’Alliance du Fleuve Congo ».
Les raisons d’être
Dès l’entame de son propos, l’ancien président de la CENI dit vouloir, à travers son appel, « sauver la Nation en danger et de restaurer la dignité du Congolais ».
Dans le but « d’en finir définitivement avec l’insécurité généralisée, les tueries et massacres massifs des populations ainsi que les idéologies génocidaires véhiculées par les forces négatives alliées au régime de Kinshasa.»
La crise sécuritaire dans l’Est de la RDC perdure depuis trois décennies maintenant, et a causé le déplacement de près de 6,9 millions de personnes, selon une dernière mise à jour de l’organisation des Nations Unies pour les Migrations (OIM).
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Corneille Nangaa estime que cette situation s’est maintenue grâce « à la faiblesse sinon à l’absence de l’Etat », aussi parce que poursuit-il, « le régime de Kinshasa a fait le choix délibéré de sous-traiter la Sécurité nationale en utilisant la guerre comme un fonds de commerce, sacrifiant les Forces Armées de la République Démocratique du Congo (FARDC) au profit des mercenaires étrangers et des Forces négatives qui écument l’Est du pays y semant mort et désolation ».
L’AFC va « œuvrer ensemble pour la mise en place d’une dynamique structurée pour la refondation de l’état et la résolution des causes profondes des conflits récurrents pour le retour de la paix définitive en République Démocratique du Congo».
Le M23 parmi les partenaires de « l’Alliance du Fleuve Congo »
On note d’abord que la majorité des composantes de cette alliance annoncée par l’ancien président de la commission électorale, ont une assise territoriale dans les trois provinces minées par l’insécurité dans l’Est du pays, notamment l’Ituri, le Nord Kivu et le Sud Kivu.
L’alliance compte dans ses rangs des mouvements politico-militaires, comme le M23 contre qui Kinshasa se bat, et qui le considère comme groupe terroriste « soutenu par le Rwanda », même si Kigali rejette cette accusation.
Corneille Nangaa cite aussi comme ses alliés, le groupe Zaire, qui selon l’Onu, a continué ces dernières années à se transformer en groupe armé, avec un réseau de trafic d’armes.
Le groupe également connu sous le nom de Front populaire d’autodéfense en Ituri (FPAC), figure parmi les mouvements qui n’ont pas adhéré au Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation, lancé par les autorités congolaises pour mettre fin à la crise qui sécoue les provinces de l’Est.
On compte aussi le groupe Twirwaneho (défendons nous en langue Banyamulenge), dont le chef, Michel Rukunda, est un miliraire de l’armée nationale congolaise mutiné en 2019. Les experts estiment que cet ancien militaire a transformé le groupe en une force de combat militairement coordonnée, représentée et financée au niveau international, même si le groupe figure sur la liste des sanctions de l’Union Européenne.
On retrouve aussi un ancien allié du gouvernement, notamment le groupe FRPI, la Force de Résistance Patriotique de l’Ituri, active dans la province éponyme depuis les années 1990, avec lequel les autorités congolaises avaient signé un accord de paix le 28 février 2020.
Il y a aussi le groupe Force patriotique et intégrationniste du Congo (FPIC) connu également comme « Chini Ya Kilima », qui tenait déjà des pourparlers avec Kinshasa, et qui en mai 2022 avait exigé devant le gouverneur de l’Ituri, une amnistie de ses membres avant de déposer les armes.
Également cités comme membre de la nouvelle alliance, le groupe Force Patriotes pour la Défense du Congo, FPDC, qui tenait aussi des pourparlers avec Kinshasa, comme 65 autres groupes armés opérant dans la région. Mais le groupe avait accusé le gouvernement en 2020, de ne pas tenir ses engagements.
On y retrouve aussi des mouvements purement politiques comme le Mouvement Article 64, formé en 2004, expliquant sa légitimité sur l’article 64 de la constitution congolaise, qui pstipule que « Tout congolais a le devoir de faire échec à tout individu ou groupe d’individu qui prend le pouvoir par la force ou qui l’exerce en violation des dispositions de la constitution»
Ou encore le ACN- Kyhanda-Yira une association culturelle du peuple Nande qui vit dans la province du Nord Kivu. Il avait pourtant appelé les populations en Septembre 2020 à « avoir confiance aux FARDC afin de mettre hors d’état de nuire l’ennemi de la paix dans la région ».
«C’est une façon de dénigrer notre communauté », a commenté un haut responsable de ce regroupement, joint par BBC Afrique, démentant toute participation du regroupement à l’alliance née à Nairobi.
Des acteurs politiques et de la société civile
Sur cet aspect, Corneille Nangaa se montre assez discret. « Pour des raisons de sécurité », il prend « le soin de ne pas citer les formations politiques qui l’accompagnent.
Il indique que « 15 Partis politiques se sont manifestés, 267 Personnalités politiques » aussi. Il mentionne également 23 Mouvements citoyens, et 41 structures de la société civile.
Pour le moment, aucun détail n’a été donné sur la structure de l’organisation, encore moins comment elle fonctionnera, ni où elle sera basée.
Mais le désormais opposant dit lancer « un appel à l’union de toutes les forces politiques, sociales et militaires de la République démocratique du Congo ».
Qui est Corneille Nangaa ?
Ancien président de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) de la RDC, Corneille Nanga est depuis février 2023, président de l’ Action pour la Dignité du Congo et de son Peuple (ADCP).
Proche de l’ancien président Joseph Kabila, il a annoncé sa candidature pour la présidentielle du 20 décembre prochain.
Corneille Nangaa vit en exil depuis… au Kenya, il a ce 15 décembre, déclaré considérer ces élections comme « un coup d’Etat électoral ».
Cheville ouvrière de la présidentielle de 2018, il a déclaré en octobre dernier, sur les antennes d’une télévision française qu’il y avait eu un « accord pour la stabilité et la paix » entre le président congolais sortant Joseph Kabila et l’actuel, Felix Tshisekedi. Il a par la même occasion fustigé la « dénégation du président Felix Tshisekedi à ce sujet ». Il est sous le coup de sanctions des États-Unis en lien avec des accusations de « corruption persistante » liées aux élections de décembre 2018.
L’ancien président de la commission électorale a été accusé par le Trésor américain d’avoir « détourné des fonds opérationnels de la CENI à des fins personnelles et politiques, retardant ainsi le processus électoral ». Des faits pour lesquels M. Nangaa a toujours clamé son innocence.
Info BBC News Afrique
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